Aristide entend éliminer l’Armée de Jovenel Moïse par Léo Joseph
- AU RISQUE MÊME DE DÉCLENCHER UNE GUERRE CIVILE
Le dimanche 23 février 2020, a éclaté une guerre civile de faible intensité entre la Police nationale et l’Armée de Jovenel Moïse, qui a duré environ six heures. À la fin des hostilités, on a enregistré un mort de part et d’autre, et au moins un jeune homme tué par les militaires, ainsi que des blessés par balles au sein de la population civile. N’était-ce une intervention providentielle, on ne sait comment aurait pu tourner cet affrontement. En tout cas, l’ex-président Jean-Bertrand Aristide ayant juré de se défaire de l’Armée de Jovenel Moïse, il y a de grands risques que la belligérance pourrait ressurgir à tout instant.
Pour avoir été l’artisan de la démobilisation des Forces armées d’Haïti défunte (FAdH), M. Aristide n’a aucun intérêt à ce qu’elle renaisse de ses cendres. Pour autant que le président haïtien s’est démêlé pour ressusciter, ne serait-ce que de nom, l’ombre de l’ancienne Armée, autant que son ancien prédécesseur et tombeur de l’ancienne FAdH jure de l’empêcher de rester mobilisée. C’est par rapport à cette démarche que s’est produite l’échauffourée entre les «deux corps distincts», formant les «uniques forces armées du pays», telles que définies par la Constitution. Ce qui revient à dire que la bataille qui avait éclaté, au Champ de Mars, à cette date, était bel et bien une guerre civile, heureusement, de courte durée. Étant donné qu’il y a eu mort d’homme, il est possible que les forces en présence trouvent des raisons pour demander des comptes sur la question du versement du premier sang.
Mais tout cela dépend des forces qui manipulent directe- ment les deux entités armées, ou les portent à réagir sans même s’en rendre compte. À Port-au-Prince, les observateurs pensent que les quelques membres de l’Armée remobilisée qui avaient pris position au Champ de Mars, sous les ordres de Moïse, afin de tenir les policiers en respect. Cette idée prend l’allure d’un vrai défi, car loin de s’apaiser, ces derniers restent mobilisés, toujours prêts à montrer de quel bois ils se chauffent. En tout cas, du train où vont les choses, il est possible que les policiers en rébellion pour exiger que leurs cinq collègues révoqués soient réintégrés au sein de la PNH, en plus de reconnaître leur droit de se regrouper en syndicat, passent une vitesse supérieure. Aussi à réagir avec détermination si Jovenel Moïse estime opportun de déployer quelques-uns des 400 soldats qui composent son Armée pour mettre les policiers à genoux. Mais quel en sera l’enjeu, si, parallèlement, des forces hostiles se mobilisent contre l’Armée remobilisée.
Aristide attend-il dans les coulisses ?
Ayant pris la décision d’abolir définitivement les Forces armées d’Haïti, l’ex-président Jean-Bertrand Aristide s’évertue par tous les moyens à tenir celles-ci en retraite permanente. Point n’est donc besoin de dire qu’il n’a point vu de bon œil le jugement de son successeur Jovenel Moïse de la ressusciter, bien qu’elle reste bancale à tous les points de vue. Aussi le prêtre défroqué faisait-il des pieds et des mains afin d’éviter qu’elle ne soit rappelée sous le drapeau. Maintenant que le chef de l’État a fini par rétablir cette Armée, l’ancien prêtre de Saint Jean Bosco s’ingénie à créer les conditions pour qu’elle reprenne sa retraite, cette fois définitivement. Aussi se démène-t- il tout le temps, surveillant les moindres occasions pour lui porter le «coup fatal». Dans les coulisses, l’homme que les journalistes étrangers appelaient «le prêtre des bidonvilles» restait, en tapinois, attendant l’occasion propice pour agir.
Il semble que l’événement du 23 février n’ait pas attiré trop d’attention. Pourtant la guerre civile était bien à nos portes. Puisque, fait-on remarquer dans certains milieux politiques, à Port-au-Prince, les hostilités qui ont éclaté, au Champ de Mars, entre des troupes de la PNH et les militaires remobilisés était l’œuvre d’Aristide.
Des personnes qui prétendent être «dans le secret des dieux» ont révélé que des «agents provocateurs» à la solde de l’ancien prêtre étaient à pied d’œuvre, au Champ de Mars, le dimanche 23 février. Selon ces révélations, ces dernières avaient été «engagées» ou bien avaient reçu des instructions pour faire feu sur les policiers qui participaient à une manifestation anti-gouvernementale pour faire valoir leur droit de se constituer en syndicat. Mais les protestataires donnaient la riposte entraînant une situation où les deux camps se trouvaient aux prises dans une véritable bataille rangée.
Suite à ces incidents, au moins trois morts ont été recensés, soient deux victimes de part et d’autre. En sus d’un jeune garçon assimilé aux manifestants ou sympathisants qui se trouvait sur les lieux. Sans négliger plusieurs blessés plus ou moins graves.
Seules sa femme et ses filles ne sont pas négociables
Jean-Bertrand Aristide n’a aucune intention de faire la paix avec l’Armée de Jovenel Moïse. Aussi pense-t-on que son plan de s’en défaire entre dans le cadre d’un projet continu dont on ne saurait prédire la date ou le lieu du prochain épisode. Dans cette perspective, des proches de l’ancien chef d’État le présente comme étant totalement engagé à cette fin.
D’ailleurs, fait-on encore savoir, dans ses milieux proches, qu’il serait disposé à entrer dans des «négociations sérieuses » pour avoir gain de cause. Dans son entourage, on lui attribue la réflexion selon laquelle, dans le cadre de ce projet, tout est négociable, exceptées «sa femme et ses deux filles»
Cet article est publié par l’édition de l’hebdomadaire Haïti-Observateur du 11 mars 2020 VOL. L No. 8, et se trouve en P. 1, 3 à : http://haiti-observateur.ca/wp-content/uploads/2020/03/H-O-11-March-2020-1.pdf