LES DIPLOMATES SISON ET LA LIME INSATISFAITES
- Des reproches adressés à Jovenel Moïse
Après avoir agi comme s’il avait le vent en poupe, au point de se sentir autorisé à annoncer la création de son Conseil électoral, Jovenel Moïse semble évoluer dans une zone de turbulence politico-diplomatique imprévisible. Loin de satisfaire aux diplomates, qui avaient suggéré qu’il crée un organisme électoral, en vue d’organiser des élections, tout semble indiquer que ce projet est voué à l’échec avant même qu’il ne soit mis à exécution.
Des proches de la présidence, au Palais national, ont indiqué que les ambassadeurs Michel Sison, chef de la mission américaine en Haïti, et Helen Meagher La Lime, représentante spéciale du secrétaire général des Nations Unies, ont rendu une visite au chef d’État haïtien, en fin de semaine, apparemment en vue d’une mise à jour de la situation politique, dans la foulée de la décision d’annoncer le mise sur pied du CEP, après avoir fait choix de neuf personnes, dans des conditions non conformes aux prescrits de la Constitution pour créer une telle organisation.
Impossible de savoir si les deux diplomates ont fait des remontrances au chef d’État haïtien. Mais des proches de ce dernier ont affirmé que la conversation que mesdames Sison et La Lime ont eue avec leur hôte a porté sur la manière dont il a lancé le projet des élections. La diplomate américaine, dit-on, lui aurait dit qu’il n’a pas procédé selon le protocole qui a été discuté.
Pour sa part, Nèg Bannann nan a répondu en disant que la situation est vraiment intenable, et que «Je ne pourrai pas faire des élections».
À ces mots, Mme Sison aurait, dit-on encore, précisé qu’ « il va falloir trouver un moyen ». Mais une source diplomatique indépendante a laissé entendre que la communauté internationale n’accueille pas de gaieté de cœur les dernières initiatives de Jovenel Moïse relatives à la formation du CEP, pour n’avoir pas tenu compte des exigences de la Constitution. Ils arguent que, loin d’aplanir le chemin, cela risque d’aliéner encore davantage une opposition hostile à toute idée de collaborer avec le président, et qui a, à plusieurs reprises, fait entendre son opposition systématique à toute suggestion de participer aux élections.
Un autre diplomate a fait savoir que créer un CEP en recourant à un modèle tout à fait contraire à ce que prévoit la Constitution du pays ne contribue en rien « à adoucir » les détracteurs de Jovenel Moïse, surtout quand ils font valoir que la Charte fondamentale doit servir de boussole dans toute initiative politique, mais surtout en ce qui concerne la réforme constitutionnelle et la mise su pied du Conseil électoral.
Certains observateurs pensent que la façon dont les diplomates dits «poids lourds» ont boudé la cérémonie d’investiture, mais surtout celle qui devait marquer l’investiture des neuf membres du CEP à leur fonction, au Pa lais national, constitue une preuve tangibles d’une certaine frustration, voire même de mécontentement de la part de ces diplomates.
On apprend, en toute dernière minute, d’une source diplomatique généralement fiable, que l’ambassade américaine ne pense pas que des élections soient possibles, dans les présentes conditions. Si de telles déclarations se confirment, Jovenel Moïse comprendra bien qu’il ne pourra compter sur l’appui de ses supporteurs traditionnels pour rester accroché au pouvoir. Ce qui, d’ores et déjà, fait danser devant lui le spectre de sa démobilisation du Palais, même avant le 7 février 2021.
cet article est publié par l’hebdomadaire Haïti-Observateur (New York) édition du 23 septembre 2020, VOL. L No.37 et se trouve en P. 1 à : http://haiti-observateur.ca/wp-content/uploads/2020/09/H-O-23-septembre-2020-1.pdf