Comment Aider les Femmes Illettrées Dans le Monde ?
Comme annoncé précédemment dans le dernier numéro d’Haïti- Observateur, « pourquoi y-a-t-il tant de femmes illettrées dans le monde ? », alors que le mois de mars est destiné à la femme. En en tant que chroniqueuse de développement personnel, je pense que c’est le moment idéal pour adresser ce fléau qu’est l’illettrisme dont les femmes sont les principales victimes.
Illettrisme et analphabétisme recouvrent souvent le même sens dans les esprits. Il faut cependant bien distinguer l’un et l’autre de ces termes. Les définitions anciennes données par les dictionnaires usuels pour <illettré> et <analphabète> sont les mêmes : « Qui ne sait ni lire, ni écrire ». Dans les années 1980, sur l’initiative des mouvements associatifs, telles qu’ATD Quart Monde, les définitions d’analphabète et d’illettré se sont différenciées.
De nos jours, on entend par « Illettré » : Personne ayant appris à lire et à écrire, mais qui, pour des raisons diverses, n’a pas acquis l’apprentissage ou en a complètement perdu la pratique. Quant à la nouvelle définition d’«analphabète» : Qui n’a jamais été confronté à l’enseignement de l’écriture et de la lecture dans sa langue d’origine. « C’est vivre en situation de grande exclusion que de se trouver, alors que l’on a été scolarisé en France, dans l’incapacité de faire un chèque, de lire un plan, un panneau indicateur, un nom de rue ou de station, de retirer seul de l’argent à un distributeur automatique, de lire des consignes de sécurité, d’écrire une liste de courses, de lire le bulletin scolaire de son enfant. Cette situation, très difficile, que l’on cherche le plus souvent à cacher, de peur d’être stigmatisé, est l’un des facteurs qui concourent aux situations d’exclusion ».
Les femmes illettrées
Il y a dans cette société une majorité de femmes et d’enfants désavantagés qui démarrent dans la vie sans recevoir la nutrition, l’instruction adéquate et la protection dont ils auraient besoin. En effet, les deux tiers des jeunes et des adultes analphabètes sont des femmes. Dans de nombreux pays en développement, les familles doivent choisir qui elles envoient à l’école. Pour des raisons culturelles, mais surtout économiques, afin de permettre à la mère d’aller travailler aux champs pour cultiver la nourriture de la famille, on demande le plus souvent aux filles de rester à la maison pour s’occuper des frères et sœurs. C’est le cas dans beaucoup de pays africains, en Haïti et en Asie du Sud (Inde, Pakistan, Népal, Bangladesh). Néanmoins on est en droit d’espérer une forte amélioration pour les jeunes générations : au Bangladesh, par exemple, où le nombre de filles à l’école dépasse à présent celui des garçons.
Les filles sans instructions courent plus de risques que les garçons d’être marginalisées. Elles sont plus vulnérables face à l’exploitation. Elles semblent contracter le VIH/SIDA plus souvent que les filles instruites, puisque la maladie se répand deux fois plus vite parmi elles que parmi les filles qui sont allées à l’école, même sans achever leurs études. Près d’un tiers de tous les adultes vivant avec le VIH/SIDA ont moins de 25 ans, et presque deux tiers d’entre eux sont des femmes.
Parvenues à l’âge adulte, ces filles illettrées auront moins de chances de participer à la vie sociale et politique et de pouvoir gagner leur vie. Le droit et l’accès des femmes à la terre, au crédit et à l’éducation sont limités, non seulement par une discrimination inscrite dans la loi, mais aussi parce que de nombreux obstacles plus subtils, comme la charge de travail, la mobilité et un faible pouvoir de négociation, tant au foyer que dans leur communauté, les empêchent d’exercer ces droits. Ces problèmes se ressentent sur leurs enfants : les femmes ne gagnent qu’un dixième du revenu mondial et détiennent moins d’un pour cent des biens, donc, les foyers qui ne sont pas dirigés par un homme risquent, plus que les autres, de s’appauvrir. Ces femmes tendent aussi à ne pas faire vacciner leurs enfants et à ne pas avoir les connaissances suffisantes pour les aider à survivre.
En 2000, le projet «Éducation pour tous» s’est engagé en faveur de l’équité et de l’égalité des sexes, avec pour principal objectif de relever le taux d’alphabétisation parmi la population féminine. Mais la cible de réduire de 50 % l’illettrisme dans le monde, d’ici à 2015, est loin d’être atteinte. Les projections tablent sur une réduction de l’ordre de 10%, d’ici 4 ans, on passera de 793 millions, aujourd’hui, à 715 millions. Dans ce domaine les progrès sont lents et difficiles.
En 2011, l’Inde a tenu une conférence internationale à l’initiative d’inviter l’ensemble des pays de l’«E9». On appelle ainsi les neuf pays en développement les plus peuplés : Pakistan, Inde, Bangladesh, Indonésie, Chine, Égypte, Nigeria, Mexique, Brésil. Des pays voisins de l’Inde ont également été conviés (Népal, Maldives, Bhoutan, Sri Lanka). L’Inde tenait à mettre l’accent sur l’illettrisme des femmes, car beaucoup d’initiatives sont nées dans ce pays. Un programme national d’envergure a été mis en place pour alphabétiser 70 millions d’adultes, dont 60 millions de femmes. Cette conférence devrait aider à donner un nouveau souffle pour que ces programmes soient relayés dans divers pays. (À suivre)…
r_bourget@yahoo.com MTS (Maitrise en Travail social) Poète/écrivaine
Cet article est publié par l’hebdomadaire Haïti-Observateur, édition du 13 mars 2019 et se trouve en P 4, et se trouvera à : http://haiti-observateur.ca/wp-content/uploads/2019/03/H-O-13-march-2019-1.pdf