Une Photo a Fait Peur à Jovenel Moise

POURQUOI HAÏTI A VOTÉ CONTRE LE VENEZUELA ?

  • Une photo a fait peur à Jovenel Moïse
  • Pris en flagrant délit de prendre livraison de marchandises défendues…

Suite au vote du Conseil permanent de l’Organisation des États américains (OEA) déclarant « illégitime » le second mandat de Nicolas Maduro, à l’occasion du- quel Haïti a joint sa voix à celle de 18 autres pays pour approuver la Résolution, tout le monde se demande pourquoi Jovenel Moïse a lâché ainsi l’homme qu’il avait dit être son « frère ». Les multiples raisons évoquées sur les réseaux sociaux attribuées au ministre des Affaires étrangères haïtien ne sont que pures fabulations. C’est ce qu’a affirmé un diplomate américain retraité. Selon lui, la vérité est toute autre : le président haïtien a été comme « foudroyé de peur » à la vue d’une photo qui lui a été présentée.

Dans la recherche d’un consensus autour de la Résolution en question, afin d’éviter l’échec de l’année dernière lorsqu’une majorité n’avait pu être trouvée pour entériner la Résolution relative à l’expulsion du Venezuela de l’organisme régional, les États-Unis avaient tout mis en en œuvre pour inciter la majorité des pays ayant refusé de voter pour suspendre le Venezuela de l’OA à rallier le camp anti-Maduro. Si d’autres moyens ont été utilisés pour séduire d’autres pays récalcitrants indécis, en ce qui concerne Haïti, on laisse croire que «le chantage» était au rendez-vous. Puisque le président haïtien s’étant révélé d’une vulnérabilité rare, les responsables américains l’auraient mis en demeure de faire ce qu’ils voulaient. En effet, des sources diplomatiques ont révélé qu’une délégation avait été envoyée en Haïti, il y a environ un mois, avec pour mission de rendre une « visite privée » au président haïtien. Au cours de cette visite, apprend-on encore, la photo de Jovenel Moïse avec un autre individu a été exhibée.

La photo en question a été prise en 2016, lors d’un survol de la propriété de M. Moïse dans le Nord (la bananeraie d’Agritrans). Accompagné de Bertrand Vieu (l’individu photographié avec lui), il effectuait un déchargement de « marchandises interdites ». Cela pourrait bien expliquer les fortes sommes d’argent liquide en dollars identifiées dans le cadre de l’enquête menée par l’UCREF sur les comptes en banque de Jovenel Moïse et de sa femme, Martine.

Euphorie suivie de silence total immédiatement après le vote d’Haïti au Conseil permanent de l’OEA, à Washington, un message diffusé sur WhatsApp, attribué au gouvernement, faisait état de ce qu’Haïti a obtenu « en contrepartie » des Américains pour avoir voté contre Maduro. La liste était si longue que, dès le début, on ne voulait pas y croire. Voici les avantages soi-disant accordés à Haïti par les États-Unis en retour de son vote en faveur de la Résolution déclarant le mandat de Nicolas Maduro illégitime.

D’abord, les États-Unis s’engagent à payer la dette d’Haïti envers le Venezuela à hauteur d’USD 3 milliards $. Aussi à intervenir pour libérer Haïti du carcan du Chapitre 7 à l’égard de l’ONU.

Aussi, révision du programme TPS par l’annulation de la disposition relative au refoulement des Haïtiens concernés.

En plus du renforcement de l’assistance sécuritaire d’Haïti en matière d’équipements et de la technique par le truchement de la coopération onusienne.

Selon l’engagement des Américains envers Haïti, Washington prendra, laisse-t-on croire aussi, toutes les dispositions pour faciliter l’accès de ce pays au crédit, afin de l’aider à promouvoir la reconstruction de son système financier et son développement. Il est opportun de rappeler que la propriété sur laquelle Agritrans avait sa bananeraie était dotée d’une piste d’atterrissage où des avions non identifiés effectuaient la livraison clandestine de stupéfiants. C’était principalement pour cette raison qu’Evinx Daniel, don la disparition reste un secret que partagent Jovenel Moïse et Michel Martelly, avait jugé utile de devenir l’associé de Nèg Bannann nan.

Après l’euphorie, le silence total

On s’imagine que les avantages décrits plus haut qu’on prétend offerts au gouvernement Moïse-Céant par l’administration Trump devraient provoquer une euphorie durable au sein de l’équipe tèt kale. Mais celle-ci n’a été que de courte durée.

D’abord, une conférence de presse annoncée par Bocchit Edmond, le ministre des Affaires étrangères d’Haïti, pour le samedi 12 janvier, a été annulée sine die. Le chancelier haïtien n’a pas saisi l’occasion pour apporter directement ces « bonnes nouvelles » au peuple haïtien.

Ensuite, non seulement personne ne parle plus des avantages offerts à Haïti pour son vote, à l’ONU, le message relatif à la contrepartie américaine a disparu des réseaux sociaux, seule la copie qui avait été trouvée originellement est disponible à ceux qui l’avaient. Aussi, près la jubilation de première heure, c’est le silence total.

Suite à l’annonce de cette conférence de presse, les autorités ont compris qu’une grave erreur a été commise, car les journalistes présents à l’événement allaient poser des questions embarrassantes auxquelles ni la présidence ni la Chancellerie n’aurait pu répondre.

En effet, personne au sein de l’administration Moïse-Céant n’allait pouvoir faire de déclaration publique à l’égard des prétentions exprimées relatives aux avantages qu’on prétend avoir été offerts par les Américains. Il y a aussi le fait que toute allusion à ceux-ci aurait donné lieu à une réplique soit de l’ambassade des États-Unis, à Port-au-Prince, ou du Département d’État, afin de tirer les choses au clair.

Mais qu’est-ce qu’Haïti a obtenu en retour pour son vote ?

Tout un chacun peut légitimement poser la question de savoir ce qu’Haïti a obtenu en retour pour son vote. Après plus d’une semaine de silence sans que les autorités n’aient annoncé la date à laquelle allait se dérouler la conférence ajournée le 12 janvier ni indiqué à quel moment le peuple haïtien sera informé par rapport aux tractations ayant abouti à ce vote, on ne peut que conclure que quelque chose ne va pas.

On doit se rappeler que, de leur côté, les autorités américaines se taisent par rapport à ce vote. Assurément, tous les avantages mentionnés s’élèvent à des milliards de dollars. D’ailleurs, la dette d’Haïti envers le Venezuela seulement se chiffre à plus d’USD 3 milliards, selon ce même document.

Au bout du compte, on sait que les discussions qui ont eu lieu autour du vote haïtien n’ont pas été menées « à la Maison-Blanche», tel qu’il a été annoncé dans le message, mais sans nul doute au Département d’État.

Mais, de toute manière, vu les conditions dans lesquelles Jovenel Moïse a été forcé de passer des instructions à son ambassadeur à l’OEA pour qu’il vote dans le même sens que les 18 autres pays qui ont ratifié la Résolution anti-Maduro, il y a de fortes chances qu’un pacte de silence ait été conclu.


cet article est publié par l’hebdomadaire Haiti-Observateur, édition du 16 janvier 2019, et se trouve en P. 1, 2 à : http://haiti-observateur.ca/wp-content/uploads/2019/01/H-O-16-jan-2019-1.pdf