Et si le président envisageait d’un conflit racial à grande échelle pour remonter la pente ? par Raymond Alcide Joseph

NOUVELLES BRÈVES

  • Et si le président envisageait d’un conflit racial à grande échelle pour remonter la pente ? par Raymond Alcide Joseph

De quel président est-il question, sinon du chef d’État américain, dont la cote de popularité est en baisse, face à son rival, et qui entrevoit dans son slogan « Law and Order » (La loi et l’ordre) un regain de popularité. Ce qui, selon ses calculs, lui faciliterait une autre victoire présidentielle.

Ainsi, hier, mardi, 1er septembre, faisant fi des demandes du maire de Kenosha et du gouverneur de l’état de Wisconsin, tous deux démocrates, de s’éloigner du Wisconsin, le président Donald Trump a débarqué à Kenosha, cette ville de 100 000 habitants, en ébullition depuis l’attentat de policiers blancs contre un jeune Noir, le 24 août dernier, laissant paralysée sa partie inférieure. Ce n’est pas pour réconforter la famille éplorée que le président a tenu à s’y rendre, mais pour souligner son soutien à la classe des affaires qu’il est de leur côté.

En effet, il n’a pas rencontré les parents et les proches de Jacob Blake, 29 ans, père de famille, que les policiers ont agressés visiblement, ce 24 août. La vidéo circule sur les ré seaux sociaux et est disponible sur l’internet. On voit une meute de policiers poursuivant le jeune Blake jusqu’à la portière de sa voiture, où se trouvaient ses enfants. Et l’un des policiers, le retenant de sa main gauche, lui inflige sept (7) balles dans le dos, dont la détonation a effrayé les enfants. L’homme s’écroula au sol. Du déjà vu à Minneapolis, dans le Minnesota, le 24 juin écoulé, quand un policier blanc, le genou sur le cou de George Floyd gémissant « I can’t breathe » durant près de neuf minutes, puis ce fut la fin.

Dans le cas de Jacob Blake, la victime n’est pas morte, mais elle est paralysée telle que déjà mentionnée, confinée à l’hôpital jusqu’à présent, et faisant face à un avenir sombre. Mais, comme c’est arrivé dans le cas de Floyd, la brutalité des policiers blancs a déclenché des manifestations, premièrement à Kenosha, mais aussi ailleurs dans d’autres villes, où les gens exigent que les policiers soient arrêtés et inculpés, en sus de payer pour leurs dérives et que justice soit faite aux victimes. Entre-temps, des manifestations pacifiques se déroulant durant la journée, le soir, à Kenosha, des magasins sont partis en flamme et nombre de fenêtres en vitre sont brisées.

Et voilà le président mettant l’accent sur les casseurs qui, souvent, détournent des manifestations pacifiques en confrontation avec la police qui va au-delà d’un simple con trôle de la situation à des affrontements regrettables. Et le président Trump d’accuser les maires des villes sous con – trôle démocrate de receleurs de brigands. Ainsi essaie-t-il de se présenter comme promoteur de l’ordre et de la loi, pour le plus grand bien des citoyens.

De l’autre côté, son rival démocrate aux élections présidentielles du 3 novembre l’accuse d’artisan de la violence. Le lundi, 31 août, Joe Biden, lors d’un discours de campagne à Pittsburgh, en Pennsylvanie, a souligné que le président est responsable de la violence dans différentes villes, disant textuellement : « il ne fait qu’alimenter les flammes. . . Sa présence est toxique ». Et Biden de continuer : « Les flammes brûlent tout sur leur passage, et voilà le président qui les évite au lieu de les affronter pour les éteindre ». Et pour démontrer qu’il n’est pas partisan du désordre, M. Biden ajoute : « Il ne faut pas brûler, mais bâtir, de préférence. Depuis quelque temps, ce président n’a pas fait montre de leadership moral. Il ne peut pas mettre fin à la violence, parce que depuis des années, il la fomente ».

En effet, le président Trump ne peut pas vraiment se défendre de telles accusations, surtout qu’il n’a pas condamné l’action d’un de ses partisans, un jeune homme de 17 ans, du nom de Kyle Rittenhouse, un Blanc qui pratique la suprématie raciale et qui aurait voyagé jusqu’à Kenosha, venant de l’état de l’Illinois, pour s’attaquer aux manifestants. Ainsi, le 26 août, deux jours après l’attentat policier contre Jacob Blake, ce Rittenhouse a abattu deux personnes dans une manifestation et blessé une troisième avant de s’enfuir. Il a été photographié au-devant de la scène, au mois de janvier, lors d’un rallye en faveur du président Trump. Aussi a-t-il été photographié, plus d’une fois, armé de son fusil, lors des manifestations « Blue Lives Matter », en appui à la police, de leur uniforme bleu, s’opposant à « Black Lives Matter », le slogan du mouvement en faveur des Noirs.

Lors d’une conférence de presse, lundi, le président Trump, répondant à une question lui demandant s’il con – dam nait l’action de Rittenhouse, eut à dire : « Il se défendait. Probablement, il serait déjà mort, s’il n’avait pas utilisé son fusil ». Mais que faisait-il à Kenosha, armé de fusil, venant d’Antioch, dans l’état limitrophe d’Illinois, à quelque 30 kilomètres ? Arrêté dans l’Illinois, Rittenhouse est inculpé pour meurtre, mais n’a pas été extradé à Wisconsin, au moins pas encore.

En tout cas, le président Trump, s’appuyant sur les Blancs, surtout les plus violents, voudrait rééditer ce qui s’est passé dans cet état en 2016 où il avait remporté la victoire sur Hillary Clinton avec un écart de seulement 22 748 voix, soit 47,2 % du total des votes contre 46,5 % en faveur d’Hillay Clinton. Pour y arriver, il croit qu’il faut soulever les Blancs, qui sont majoritaires dans le Wisconsin ― d’ailleurs dans tout le pays — contre les Noirs qui sont taxés de « terroristes » supportant l’équipe Joe Biden-Kamala Harris.

Il ne reste que 62 jours, à partir d’aujourd’hui, 2 septembre, au 3 novembre 2020 quand l’on saura si le président américain a bien calculé. Car, comme le dit si bien le proverbe créole : « Se ka byen konte, men mal kalkile ! » RAJ 2 septembre 2020 raljo31@yahoo.com

*Un ultimatum de l’OEA lancé au président Moïse : Des élections législatives en janvier C’est Le Nouvelliste, dans son édition du 31 août, qui annonce que, selon une correspondance du secrétaire général de l’Organisation des États Américains, Luis Almagro, en date du 26 août, il aurait “sommé” le président Jovenel Moïse d’organiser les élections législatives, “au plus tard, à la fin du mois de janvier de l’année prochaine”.

Et Le Nouvelliste de faire cette citation de la lettre d’Almagro: “Il est impératif d’organiser les élections législatives au plus tard à la fin du mois de janvier de l’année prochaine pour restaurer, en toute sérénité, un Parlement fonctionnel puis, le moment venu, de respecter les échéances électorales afin de procéder au transfert démocratique du pouvoir exécutif”.

Mais un ultimatum en date du 26 août ne peut plus tenir après l’événement du 28 août, savoir l’assassinat du bâtonnier Monferrier Dorval, dans les conditions que l’on sait. Assurément, Luis Almagro, bien que tout-puissant, ayant même avalisé son président jusqu’au 7 février 2022, est en train de préparer une autre lettre. Car, avaliser un assassin à ce tournant pourrait avoir de mauvaises conséquences en ce qui le concerne.

*Claude Joseph, le ministre des Affaires étrangères du gouvernement MoïseJouthe, dans une lettre au Corps diplomatique, en date du 31 août, fait un héros du bâtonnier assassiné, c’est ne rien comprendre. Selon Claude Joseph, les assassins de Me Monferrier Dorval seraient les oligarques, ceux qu’il défendait, mais qui s’opposent au programme du président Jovenel Moïse qui vise le plus grand bien du peuple haïtien.

Dans sa missive, il dénonce “la remontée des actes de criminalité dans le pays, notamment l’assassinat révoltant du bâtonnier Monferrier Dorval en sa résidence” qui, pour lui, est lié à “la stratégie du chaos mise en œuvre par un secteur de la vie politique dans la perspective de fragiliser l’organisation des élections dans le pays”.

Ainsi, conclut-il en demandant aux partenaires étrangers de redoubler d’ardeur dans leur support du président. “Nous ne pouvons que remercier nos principaux partenaires et amis pour leur appui indéfectible à la démocratie haïtienne”. Et patati et patata. Quelle audace! On y reviendra. RAJ 2 septembre 2020


Cet article est publié par l’hebdomadaire Haïti-Observateur New York, VOL. L No. 34, édition du 2 septembre 2020, et se trouve en P.16 à : http://haiti-observateur.ca/wp-content/uploads/2020/09/H-O-2-september-2020-1.pdf