ACTA NON VERBA, C’EST LE SLOGAN APRÈS LE 17 OCTOBRE
- Jovenel Moïse n’en finit pas avec les palabres par Léo Joseph
- Les révocations effectuées au sein de ses conseillers jugées non crédibles
Nonobstant les promesses spectaculaires qu’il a faites, dans la foulée de la journée du 17 octobre, le président haïtien ne finit pas de temporiser avec le people haïtien, dans le cadre de la lutte contre la corruption, en général, et la poursuite des dilapidateurs du fonds PetroCaribe, en particulier. Il y a lieu de s’interroger sur sa sincérité par rapport à la décision à lui attribuée d’éjecter Wilson Laleau du Palais national, en tant que son chef de cabinet, un de ses conseillers privilégiés dans la gestion de sa campagne consistant à protéger les femmes et hommes accusés de voler et/ou de détourner les USD 3,8 milliards $ de profits effectués sur la vente sur le marché national des produits pétroliers importés du Venezuela.
En effet, on ne sait pas au juste qui est maintenu vraiment comme conseillers et qui est définitivement mis en gare. Puisque, en dehors des informations diffusées sur les réseaux sociaux faisant état de la révocation de Wilson Laleau et d’Yves Germain Joseph, ainsi que de seize conseillers spéciaux, ou conseillers tout court, aucun arrêté émané de l’exécutif’ n’a confirmé ces faits. D’aucuns pensent qu’il s’agit bien d’une stratégie de Jovenel Moïse visant à donner le change. Car, pris entre l’enclume et le marteau, il estime pouvoir rassurer ses alliés politiques, quant à leur sort par rapport aux poursuites qu’il prétend vouloir lancer; et son souci de donner satisfaction aux demandeurs de procès contre les personnes indexées dans les deux rapports de la Commission éthique et anticorruption du Sénat, dont les deux enquêtes ont été menées, tour à tour, par les sénateurs Youri Latortue et Évalière Beauplan.
L’histoire se corse concernant les personnes soient disant conseillers révoqués
Dans les milieux proches de la présidence, une rumeur persistante voulait que l’ancien ministre des Finances et des Affaires économiques de Michel Martelly, recyclé dans l’administration Moïse-Lafontant, en février 2017, avait quitté le pays pour se rendre à Boca Raton, en Floride. Mais cette information s’est révélée fausse, car Wilson Laleau se trouve encore en Haïti. Toutefois, on ne devrait pas considérer cette information comme étant totalement fausse. Puisque, immédiatement après la fin du mandat de Martelly, le professeur Lalo avait quitté le pays pour éviter de se présenter à une convocation à lui adressée sous forme d’un mandat de comparution qui avait été décerné contre lui par le commissaire du gouvernement d’alors, Jean Danton Léger. Bien que M. Laleau ait été sous le coup d’une interdiction de départ, il avait pu bénéficier de l’aide de ses « amis » de Washington pour tromper la vigilance des autorités policières haïtiennes. Mais les choses ont changé. Car ces « amis » de Washington ont, par la suite, réalisé à quel point Wilson Laleau était impliqué dans l’affaire PetroCaribe. D’où, cette fois, la décision de tenir Laleau à distance.
On explique encore, dans l’entourage du président Moïse, que les dernières dispositions ont été prises en représailles contre les conseillers qui l’ont « induit en erreur ». Car, explique-t-on, les hommes et femmes à qui il a montré la porte sont précisément ceux-là qui lui avaient recommandé les déclarations qu’il avait faites à Paris, au mois de décembre 2017 : « Pas de chasse aux sorcières sous mon administration » en guise de réponse à ceux qui demandent l’arrestation et le jugement des dilapidateurs du fonds PetroCaribe; il déclarait aussi avoir reçu une liste de 50 «juges corrompus » pour être nommés au système judiciaire.
Quel atout a Jovenel Moïse en réserve
De toute évidence, Jovenel Moïse n’est pas au bout de ses tourments, même après avoir révoqué 16 conseillers et deux hauts cadres de son administration. Car ces réformes ne sont pas bien accueillies par les demandeurs de reddition de compte, dans le cadre de l’affaire PetroCaribe. Puisque les petrochallengers ont déclaré qu’ils veulent rester mobilisés pour exiger la démission « dans l’immédiat » de Jovenel Moïse. C’est comme la nation entière qui pense que les dernières révocations ordonnées par le chef de l’État entrent dans le cadre d’une stratégie pour chloroformer les militants, par rapport aux demandes de la population haïtienne ayant à sa tête le mouvement PetroCaribe Challenge. Ceux qui entretiennent des soupçons, eu égard aux intentions du chef d’État haïtien, peuvent avoir de bonnes raisons de se méfier de ces dernières dispositions. Car des personnalités proches de la présidence, qui souhaitent rester dans l’anonymat, ont révélé que Wilson Laleau et Yves Germain Joseph, ainsi que la plupart des conseillers auraient « reçu l’assurance » du président qu’ils ne doivent s’inquiéter de rien. Selon ces informateurs, les récentes décisions de Moïse vise à se prémunir contre une prochaine « disposition démagogique », sous forme de mandats d’emmener qui seraient émis par le commissaire du gouvernement, sous la dictée du chef de l’État lui-même. Mais, ont-ils précisé, ces mandats ne seront d’aucun effet, car les avocats de la défense ont les possibilités de présenter des recours en faveur de leurs clients, qui seraient susceptibles d’entraîner des décisions en leur faveur. C’est, en tout cas, ce qu’ont confié au moins deux personnes proches de la présidence.
Un stratagème pour dérouter la mouvement PetroCaribe Challange
La campagne PetroCaribe Challenge, qui a mobilisé plus de 3 millions de protestataires, dans la de la capitale et des villes de province, a gagné des sympathisants au Palais national, au point que certaines personnes évoluant dans l’orbite de la famille présidentielle estiment devoir dénoncer les magouilles qui se donnent libre cours au sein de l’équipe au pouvoir, par rapport aux faux-semblants qu’elle mijote, eu égard aux vraies intentions du chef de l’État et son entourage. Aussi, tous ces partisans du pouvoir, qui ont tourné casaque, face à la puissante machine PetroCaribe Challenge, s’évertuent-ils à s’insinuer dans les bonnes grâces des opposants du pouvoir pour des raisons bien évidentes. D’où les révélations suivantes.
En effet, ces personnalités, qui passent pour des proches de Jovenel Moïse, ont précisé que ce dernier croit devoir lancer une stratégie pour desserrer l’étau autour de lui. Selon ce que lui et ses proches collaborateurs pensent, il faut donner l’impression d’accéder aux demandes de la rue. Mais, en réalité, Jovenel Moï se n’a aucune intention de «jeter ses amis et alliés dans la gueule du loup ». Quand on fait courir le bruit que Wilson Laleau est parti pour Miami avec l’autorisation du président, cela ne devrait pas être pris à la légère.
Des conseillers révoqués de retour au Palais national
Il semble que les révélations relatives à cette stratégie dite « dispositions démagogique » ne soient pas dénuées de sens, comme certains voulaient le faire croire. Puisque, moins d’une semaine après avoir montré la porte de sortie du Palais national à ses conseillers, Jovenel Moïse a invité certains d’entre eux, triés sur le volet, à regagner leurs bureaux.
En effet, Guiichard Doré s’est félicité d’avoir été rappelé à son poste par le président. Rien d’étonnant, car il fait partie du genre d’hommes sur qui peut compter Jovenel Moïse, car son itinéraire politique au sein de l’administration Mooïse-Lafontant fait de lui un pratiquant de la corruption.
Comme on dit en créole, « Si lakay pa vann ou, moun dey. pa p achte w». Des sources proches de la présidence ont fait savoir que Guichard Doré a fait l’acquisition d’une maison à Montagne Noire (quartier appelé Taraz, pour USD 800 000,00 $. Dans un pays dont l’administration gère les affaires de la République dans l’opacité totale, on ne peut savoir exactement combien touche un conseiller comme Doré. En tout cas, on sait qu’il ne gagne pas USD 75 $ ou même USD 100 000,00. D’où la question : par quels tours d’adresse a-t-il pu recourir pour trouver cette somme colossale pour acheter cette maison ?
Dans le même ordre d’idées, Renald Lubérice, un conseiller de Moïse, qui a son oreille, ne s’est pas laissé damer le pion par Guichard Doré. De toute évidence, de même acabit que ce dernier, il doit manger au même atelier que lui.
Les mêmes sources ont précisé, en effet, que Lubérice est propriétaire d’une ferme, dans la région de Lascahobas, dans le Plateau Central, qui s’étale sur 200 carreaux de terre. Même si la propriété elle-même appartient à l’État, qu’il aurait obtenue à bail, le salaire qu’il gagne en tant que conseiller du président ne lui permettrait pas d’autofinancer cette entreprise. Selon toute vraisemblance, le financement nécessaire pour faire marcher cette ferme doit provenir d’une des institutions de l’État où la gent au pouvoir s’approvisionne à qui-mieux-mieux.
Lubérice s’est ancré solidement à Jovenel Moïse. Même sa femme, Esther Antoine, qui était la directrice de campagne du président, s’était acheté un 4 x 4 blindé pour USD 120 000,00 après les élections de leur patron.
Si l’on comprend bien la manière dont fonctionnent les gouvernements tèt kale, il y fort à parier que Guichard Doré et Renald Lubérice seraient bénéficiaires de gros prêts de l’Office nationale d’assurance vieillesse (ONA).
Il ne serait pas farfelu non plus de croire que ces deux conseillers de M. Moïse soient des participants au pillage du fonds Petro Caribe.
Christine Coupet mise à l’écart pour de bon
Tous les conseillers de Jovenel Moïse ont le même titre, mais ils ne sont pas égaux. C’est ce que Christine Coupet Jacques, mise à pied en même temps que Wilson Laleau, Yves Germain Joseph et les seize autres, s’est méprise du rappel de Guichard Doré à sa fonction par le chef de l’État. Elle se mettait en tête qu’il s’agissait d’un rappel global. Aussi s’était-elle présentée au Palais national, aujourd’hui même (mardi 23 octobre), pour reprendre sa place à son bureau.
Mais Mme Coupet s’est vu interdire l’entrée à la résidence officielle du président. Lorsqu’elle persistait à demander qu’elle soit admise, on a rapporté sur le réseau WhatsApp qu’elle a été mise malhonnêtement à la porte».
À en croie Guichard Doré, cette révocation massive de conseillers par le président Moïse se serait justifiée par la décision de ce dernier de réduire le train de vie de l’État. Dans ce cas précis, il s’agirait de réduire le budget de la présidence. Guichard a laissé entendre que depuis quelque temps, le chef d’État laissait entendre qu’il voulait réduire le nombre de ses conseillers à six ou 7.
En ce qui concerne la grande majorité des Haïtiens, Jovenel Moïse n’a encore rien fait pour lancer la campagne contre les voleurs des USD 3,8 milliards $ du fonds PetroCaribe. Aussi préconisent-ils une « mobilisation manche longue », jusqu’à l’abandon du pouvoir par Jovenel Moïse.
Reynold Georges repêché aussi L’avocat Reynold Gorges, mis à pied comme conseiller spécial de la présidence, en même temps que les quinze autres, a été rappelé à son poste. Son retour au Palais national semble coïncider avec son nouveau discours définitivement pro-PetroCaribe Challenge, un signe des temps, et qui paraît donner le ton à la nouvelle politique qu’entend introduire Jovenel Moïse par rapport au dossier PetroCaribe.
Me Georges n’a pas fait dans les dentelles pour afficher son hostilité aux personnalités mises en cause dans le dossier PetroCaribe. À peine a-t-il été rappelé au Palais national qu’il a déclaré qu’il faut procéder à l’arrestation de toutes les personnes accusées.
L’homme de droit prend le contre-pied de la thèse selon laquelle toute personne est présumée innocente jusqu’à preuve du contraire. Il argue que, dans ces cas, toute personne est présumée coupable jusqu’à preuve du contraire.
À la lumière de cette déclaration de Reynold Georges, on se demande si Jovenel Moïse aura le courage de rompre si brutalement avec ses alliés politiques pour laisser les coudées franches aux institutions concernées dans l’accomplissement de leurs tâches respectives.
Il reste à voir si, par ces paroles, Reynold Georges a la responsabilité de formuler la politique judiciaire de Jovenel Moïse à l’égard des dilapidateurs du fonds PetroCaribe.
cet article est publié par l’hebdomadaire Haïti-Observateur, édition du 24 octobre 2018 et se trouve en P. 1, 15. 16 à : http://haiti-observateur.ca/wp-content/uploads/2018/10/H-O-24-octob-2018-2.pdf